Le Conseil d’Etat a annulé, jeudi 9 novembre, la dissolution des Soulèvements de la Terre. Le collectif écologiste avait été dissous le 21 juin en conseil des ministres, le gouvernement dénonçant le « recours à la violence » des membres du groupe. « Une mesure de dissolution porte une atteinte grave à la liberté d’association, principe fondamental reconnu par les lois de la République, a tenu à rappeler la haute juridiction administrative. Elle ne peut donc être mise en œuvre que pour éviter des troubles graves à l’ordre public. »
Selon le Conseil d’Etat, « aucune provocation à la violence contre les personnes ne peut être imputée aux Soulèvements de la Terre ». Le relais, avec une certaine complaisance, d’images d’affrontements de manifestants avec les forces de l’ordre, notamment contre la construction de retenues d’eau à Sainte-Soline (Deux-Sèvres), « ne constitue pas une revendication, une valorisation ou une justification de tels agissements », a insisté le Conseil d’Etat.
La juridiction administrative a toutefois estimé que Les Soulèvements de la Terre « [s’étaient] bien livrés à des provocations, à des agissements violents à l’encontre des biens ». Néanmoins, leur dissolution ne constituait pas « une mesure adaptée, nécessaire et proportionnée à la gravité des troubles susceptibles d’être portés à l’ordre public », selon elle.
Cette décision constitue un « sérieux revers pour le ministère de l’intérieur », se sont félicités Les Soulèvements de la Terre dans un communiqué. Le Conseil d’Etat « confirme, à notre sens, l’idée que face au ravage des acteurs privés, de l’agriculture intensive, de l’accaparement de l’eau, nos modes d’actions puissent et doivent être considérés comme légitimes », a encore commenté l’organisation, saluant une décision « porteuse d’espoirs pour la suite du nécessaire combat que nous devons mener face aux destructions en cours ». « Si on avait été dissous, ça aurait créé un précédent qui aurait permis de criminaliser, voire de dissoudre tout mouvement qui pratique la désobéissance civile », a commenté l’une des porte-parole du mouvement, Léna Lazare, lors d’une conférence de presse organisée devant le Conseil d’Etat.
Mouvement né dans l’ex-ZAD de Notre-Dame-des-Landes
En revanche, le Conseil d’Etat a validé la dissolution de trois autres associations : la Coordination contre le racisme et l’islamophobie (CRI), dissoute le 20 octobre 2021, l’Alvarium, un groupuscule d’ultradroite établi à Angers, dissous le 17 novembre 2021, et le GALE (Groupe antifasciste Lyon et environs), dissous le 30 mars 2022.
Le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin, avait engagé la procédure de dissolution des Soulèvements de la Terre le 28 mars, quelques jours après les violents affrontements entre gendarmes et opposants aux retenues d’eau de Sainte-Soline, dont l’exécutif avait imputé la responsabilité au mouvement.
Saisi en août d’un référé par le collectif écologiste, le Conseil d’Etat avait suspendu le décret de dissolution au regard d’un « doute sérieux » existant sur les motifs invoqués par l’exécutif pour dissoudre le mouvement. La plus haute juridiction administrative avait contesté la qualification des actions du mouvement « comme des agissements troublant gravement l’ordre public ».
Les Soulèvements de la Terre sont un jeune mouvement qui revendique des actions d’occupation ou parfois de sabotage au nom de la défense de l’environnement.
Ils sont nés en janvier 2021 dans l’ex-zone à défendre (ZAD) de Notre-Dame-des-Landes (Loire-Atlantique), afin de lutter « contre l’artificialisation et contre l’accaparement agro-industriel ». Après la bassine de Sainte-Soline et le projet d’autoroute Castres-Toulouse, ils ont visé l’exploitation du sable dans la région nantaise et le projet ferroviaire Lyon-Turin.
Contribuer
Réutiliser ce contenu