Qu’est-ce que l’eutrophisation ? Quelles sont les causes du processus et ses effets ? Comment évolue le phénomène et quelles sont les solutions pour l’enrayer ?

Définition de l’eutrophisation

L’eutrophisation désigne un processus d’accumulation des nutriments dans un écosystème donné (un milieu dit « eutrophe » est littéralement un milieu « bien nourri »).

Ce phénomène, qui concerne principalement l’azote et le phosphore, se traduit par une modification progressive des équilibres biologiques de l’écosystème concerné.

Il existe naturellement des milieux eutrophes. Cependant, une eutrophisation de milieux naturellement oligotrophes (pauvres en éléments nutritifs) entraîne un déficit de biodiversité. Le processus, accentué par le réchauffement climatique, favorise en effet les espèces (végétales et animales) à croissance rapide au détriment des espèces à croissance plus lente. À terme, en milieu aquatique, ce déséquilibre peut provoquer une anoxie (privation d’oxygène) chronique qui s’avère fatale pour la plupart des espèces.

Pour mieux comprendre, voici une vidéo explicative réalisée par Le Réveilleur :

Eutrophisation : causes et conséquences

Origines de l’eutrophisation dite anthropique

Comme pour nombre d’autres phénomènes de déséquilibres environnementaux, c’est l’activité humaine qui provoque la plupart des situations d’eutrophisation préjudiciables aux écosystèmes, dont principalement :

  1. L’agriculture intensive et notamment l’élevage : les engrais chimiques et autre fumiers et lisiers, lorsqu’ils sont en excès, sont drainés par les intempéries contaminent les milieux naturels ;
  2. La gestion des déchets, et en particulier des eaux usées : les eaux usées domestiques et industrielles, qui contiennent des niveaux élevés de nutriments, peuvent entraîner une augmentation de la charge en nutriments dans les plans d’eau, tout comme les boues d’épuration imparfaitement traitées, urbaines et/ou industrielles ;
  3. Les changements dans l’utilisation des sols : la conversion des terres agricoles en zones urbaines, peut également avoir un impact sur l’eutrophisation, en favorisant le ruissellement d’eaux de pluies polluées. Les déforestations, incendies et coupes rases, qui favorisent le ruissellement et l’érosion, contribuent également à l’eutrophisation.

Effets d’une eutrophisation non contrôlée

Les conséquences sur les milieux et leur biodiversité sont variables selon les écosystèmes touchés, en partie réversibles mais pour certaines définitives :

  1. Prolifération d’algues : l’eutrophisation peut entraîner une prolifération excessive d’algues et d’autres plantes aquatiques, qui peuvent réduire la quantité de lumière disponible pour les autres plantes et organismes, et finir par créer des zones mortes où la vie aquatique ne peut plus survivre.
  2. Déclin de la qualité de l’eau : les algues et autres plantes aquatiques qui prolifèrent en raison de l’eutrophisation peuvent produire des toxines et des substances nocives pour les animaux aquatiques, ainsi que pour les humains qui consomment des poissons ou des crustacés issus de ces eaux.
  3. Mort des poissons et d’autres animaux : les zones mortes créées par la prolifération d’algues peuvent entraîner la mort de poissons et d’autres animaux aquatiques, qui sont incapables de survivre dans des eaux pauvres en oxygène.
  4. Perte de biodiversité : l’eutrophisation peut réduire la biodiversité des écosystèmes aquatiques en favorisant la croissance de certaines espèces de plantes et d’algues au détriment d’autres.
  5. Coûts économiques : l’eutrophisation peut avoir des coûts économiques importants pour les industries qui dépendent des écosystèmes aquatiques, telles que la pêche et le tourisme.

Il est donc important de prendre des mesures pour réduire les niveaux de nutriments dans les plans d’eau et prévenir l’eutrophisation afin de protéger la qualité de l’eau et la santé des écosystèmes aquatiques.

Exemple de milieux touchés par l’eutrophisation et évolution mondiale

L’eutrophisation est essentiellement liée aux cycles de l’eau (naturels et artificiels), par laquelle les surplus de nutriments envahissent les écosystèmes. Tous les milieux contenant de l’eau, même en faible quantité, sont donc concernés, a fortiori ceux dont l’élément liquide est un constituant majeur.

En cela, les milieux aquatiques, y compris marins, ainsi que les zones humides, sont particulièrement sensibles au phénomène. Les eaux captives ou stagnantes (mares, étangs, lacs, marais…) viennent en première ligne. C’est également le cas des estuaires, des baies et des golfes qui sont le réceptacle de tous les nutriments drainés en amont par les cours d’eau et le ruissellement.

Amplifiée par le réchauffement climatique, l’évolution du phénomène est mondiale, jusqu’à impacter des sites aussi emblématiques que les grands lacs américains, le lac Léman ou la mer Baltique. Parmi les exemples les plus significatifs de milieux touchés par l’eutrophisation on trouve notamment :

  • Le lac Érié : le lac Érié, situé en Amérique du Nord, a été touché par de graves problèmes d’eutrophisation dans les années 1960 et 1970. Les niveaux élevés de phosphore provenant de sources agricoles et industrielles ont provoqué une prolifération d’algues et de plantes aquatiques, qui ont fini par créer des zones mortes où la vie aquatique ne pouvait plus survivre. Depuis lors, des efforts ont été déployés pour réduire les niveaux de phosphore dans le lac, et la qualité de l’eau s’est améliorée.
  • Le golfe du Mexique : le golfe du Mexique a également été touché par l’eutrophisation, en grande partie en raison des niveaux élevés de nutriments provenant des rivières qui se jettent dans le golfe. Cette prolifération d’algues a créé une zone morte, où la vie aquatique ne peut plus survivre.
  • La mer Baltique : la mer Baltique est l’une des régions les plus touchées par l’eutrophisation dans le monde. Les niveaux élevés de nutriments provenant de sources agricoles et urbaines ont entraîné une prolifération d’algues et la création de zones mortes où la vie aquatique ne peut plus survivre.
  • Les lacs alpins : les lacs alpins, tels que le lac de Constance en Europe, ont également été touchés par l’eutrophisation en raison de la pollution par les nitrates et les phosphates provenant de l’agriculture et des zones urbaines.

Ces exemples montrent l’ampleur du problème de l’eutrophisation à l’échelle mondiale, et la nécessité de prendre des mesures pour réduire les niveaux de nutriments dans les plans d’eau.

Lutte contre l’eutrophisation : les solutions

L’eutrophisation d’origine anthropique n’est pas une fatalité. De nombreuses mesures, mises en œuvre en complémentarité et en cohérence, sont susceptibles d’inverser la tendance et même de restaurer certains écosystèmes pourtant sévèrement impactés. Ces mesures sont d’autant plus pertinentes qu’elles participent d’une approche globale visant à une stratégie de développement durable dans tous les domaines de l’activité humaine et de ses impacts environnementaux. Ce sont, entre autres :

  • une diminution radicale des engrais chimiques et solubles dans l’eau ;
  • une reconstitution pertinente des systèmes bocagers de haies, talus et autres bosquets et zones tampons qui limitent le ruissellement et retiennent les nutriments ;
  • une amélioration technologique des stations d’épuration et du traitement des lisiers d’élevage, visant notamment à une meilleure élimination et/ou au recyclage de l’azote et du phosphore…