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Energie

Pourquoi la production des centrales nucléaires est-elle réduite par EDF en cas de canicule?

La production d'électricité dans certaines centrales nucléaires sera réduite dans les prochains jours en raison des fortes chaleurs attendues.

Dans la vallée du Rhône, les réacteurs nucléaires tourneront au ralenti dans les prochains jours. EDF envisage de réduire la production des centrales du Bugey (Ain) et de Tricastin (Drôme) en raison des fortes chaleurs attendues en fin de semaine. Une mesure habituelle en cas de canicule: c'était déjà le cas à la mi-juillet et au début du mois d'août, de même qu'à de nombreuses reprises les années précédentes, notamment dans le sud-est de la France.

C'est l'eau qui perturbe le fonctionnement des centrales nucléaires. Car ces dernières ont besoin de grandes quantités d'eau pour refroidir en permanence leurs installations, ce qui explique qu'elles ont été toutes construites au bord de la mer ou à proximité d'un fleuve, d'un canal ou d'un estuaire. Les centrales prélèvent de l'eau froide, l'utilisent pour refroidir les réacteurs nucléaires et les piscines d’entreposage du combustible usé, puis la rejettent plus chaude.

Préserver la faune et la flore

Or, ces rejets d'eau chaude sont soumis à une stricte limite de température pour préserver la faune et la flore – l'élévation inhabituelle de la température de l'eau, même de quelques degrés, est fortement préjudiciable pour la biodiversité aquatique. Par exemple, à l'aval de la centrale de Saint-Alban (Isère), la température de l'eau du Rhône ne doit pas dépasser 28°C en été, ce qui avait contraint EDF à mettre à l'arrêt les deux réacteurs à l'été 2018 lors de fortes chaleurs.

Les centrales nucléaires fonctionnant en "circuit ouvert", c'est-à-dire rejetant l'eau directement dans le cours d'eau, sont les premières concernées en cas de canicule (Tricastin, Blayais, Saint-Alban, réacteurs n°2 et n°3 du Bugey, Fessenheim avant sa fermeture). Mais les autres centrales, celles qui possèdent des tours "aéroréfrigérantes" refroidissant l'eau au contact de l'air avant de la rejeter, n'en sont pas épargnées pour autant, comme à Golfech (Tarn-et-Garonne) en 2019.

Trop peu d'eau dans le fleuve

Par ailleurs, outre les considérations environnementales, la canicule n'est pas non plus sans conséquence sur la sûreté des centrales. Une sécheresse prolongée peut conduire à une période "d'étiage", c'est-à-dire au niveau minimal, pour le fleuve. Son débit est alors insuffisant pour pouvoir y pomper l'eau nécessaire au refroidissement des installations. La baisse du débit de la Meuse avait entraîné l'arrêt complet de la centrale de Chooz, dans les Ardennes, en août 2020.

À l'intérieur de la centrale, de très fortes températures lors d'un épisode de canicule peuvent également perturber le fonctionnement des circuits de ventilation, des systèmes de sûreté ou encore des groupes électrogènes de secours, car ils ont besoin d'eau ou utilisent de l'air extérieur. L'élévation de la température de l'eau du fleuve favorise aussi la prolifération d'algues et de micro-organismes qui obstruent l'entrée des tuyaux d'eau alimentant la centrale nucléaire.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV